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François de Sales et nous (V)

Le triangle de l’amour

       C’est le chapitre 11 du Livre X du Traité qui nous dit « Comment la très sainte charité produit l’amour du prochain » :

       « Comme Dieu créa « l’homme à son image et semblance », aussi a-t-il ordonné un amour pour l’homme à l’image et semblance de l’amour qui est dû à sa Divinité : « Tu aimeras, dit-il, le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur ; c’est le premier et le plus grand commandement. Or le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Mt 22, 37-39).

       . Pourquoi aimons-nous Dieu, Théotime ? « La cause pour laquelle on aime Dieu, dit Saint Bernard, c’est Dieu même ; » comme s’il disait que nous aimons Dieu parce qu’il est la très souveraine et très infinie bonté.

       . Pourquoi nous aimons-nous nous-mêmes en charité ? Certes, c’est parce que nous sommes « l’image et semblance » de Dieu.

       . Et puisque tous les hommes ont cette même dignité, nous les aimons aussi comme nous-mêmes, c’est-à-dire en qualité de très saintes et vivantes images de la Divinité …

       C’est donc ainsi, que la même charité qui produit les actes d’amour de Dieu, produit en même temps ceux de l’amour du prochain : et tout ainsi que Jacob vit qu’une même échelle touchait le ciel et la terre, servait également aux Anges pour descendre comme pour monter, nous savons aussi qu’une même dilection s’étend à chérir Dieu et le prochain, nous relevant à l’union de notre esprit avec Dieu et nous ramenant à l’amoureuse société des prochains ; en sorte  toutefois, que nous aimons le prochain en tant qu’il est à l’image et semblance de Dieu, créé pour communiquer avec la divine Bonté, participer à sa grâce et jouir de sa gloire (= sa vie ici et dans l’éternité).

       Théotime, aimer le prochain par charité c’est aimer Dieu en l’homme ou l’homme en Dieu (cf Tobie 7, 1-8. Le jeune Tobie est reçu et fêté, parce qu’il ressemble à son père).

       « Hé, vrai Dieu, Théotime, quand nous voyons un prochain créé à l’image et semblance de Dieu, ne devrions-nous pas dire les uns aux autres : Tenez, voyez cette créature, comme elle ressemble au Créateur ? Ne devrions-nous pas nous jeter sur son visage, l’embrasser et pleurer d’amour pour elle ? Ne devrions-nous pas lui donner mille et mille bénédictions ?  Et quoi donc ? Pour l’amour d’elle ? Non, certes, car nous ne savons pas si elle est digne d’amour ou de haine (Qo. 9,1) en elle-même. Et pourquoi donc ? O Théotime, pour l’amour de Dieu qui l’a formée à son image et semblance, et par conséquent rendue capable de participer à sa bonté en la grâce et en la gloire, pour l’amour de Dieu, dis-je, de qui elle est, à qui elle est, par qui elle est, en qui elle est, pour qui elle est, et qu’elle ressemble d’une façon toute particulière.

        Et c’est pourquoi non seulement le divin amour commande mainte fois l’amour du prochain, mais il le produit et répand lui-même dans le cœur humain comme sa ressemblance et son image ; puisque tout ainsi que l’homme est l’image de Dieu, de même l’amour sacré de l’homme envers l’homme est la vraie image de l’amour céleste de l’homme envers Dieu. » 

        Le sommet de la vie chrétienne, c’est « Tu aimeras ». Un amour qui va dans deux directions :

« le Seigneur ton Dieu »  et « ton prochain ». En fait, il y a un troisième destinataire : c’est nous-mêmes : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Il y a un amour correct et nécessaire de nous-mêmes : nous aimer en charité, c’est-à-dire, comme Dieu nous aime, en qualité d’image de Dieu.

        Ne pas nous aimer nous-mêmes rend difficile, psychologiquement, l’amour des autres : « Celui qui est dur pour soi-même, pour qui serait-il bon ? » (Si 14, 5) Et c’est comme si nous disions à Dieu : « Je reconnais que tu m’as créé, je suis ton œuvre, mais tu n’as pas fait un bel ouvrage ! »

Le psaume 138 nous fait dire, au contraire : « Je reconnais devant toi le prodige, l’être étonnant que je suis : étonnantes sont tes œuvres, toute mon âme le sait. »

       Le texte ci-dessus du Traité nous rappelle que la source de tout amour c’est Dieu : « Il nous a aimés le premier » (1 Jn 4, 7-11) et il nous rend capables d’aimer nous-mêmes et les autres.

       Relisons, dans Amoris laetitia, N° 90-118, la méditation du Pape François sur l’hymne à la charité de saint Paul (1 Cor, 13).

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