Un si grand mystère
La solennité de cette fête nous provoque à sortir de notre torpeur. Le Seigneur nous redit en effet ces paroles incroyables : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde ». Nous serions en droit de répliquer : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » L’Eucharistie dépasse tellement nos capacités humaines ! Comme l’amour de Dieu pour nous, elle est quelque chose de déroutant et de bouleversant. Mais un mystère n’est pas une réalité inaccessible à notre nature limitée, il est bien plutôt une réalité tellement grande et belle que nous n’aurons jamais fini de la sonder et de nous en émerveiller.
Sacrement de la vie
« Celui qui vivra par moi… » ne cesse de nous redire Jésus en Saint Jean. Vivre par quelqu’un, c’est avoir le cœur pris par lui. D’une certaine manière, c’est en faire le moteur de son existence. C’est renoncer de vivre par soi-même pour puiser en l’autre son énergie. Et c’est bien ce qui se réalise en chaque communion qui ne nous met pas seulement en présence du Ressuscité mais qui, davantage encore, nous donne sa propre vie.
« Le Sauveur a institué le sacrement de l’Eucharistie, qui contient réellement son corps et son sang, afin que celui qui en mange vive éternellement. » Saint François de Sales, IVD II, 20
Fruits de ce sacrement
Oui, le Corps du Christ que nous recevons sous les espèces du pain et du vin est bien la source de la vie ! Il est cette manne nouvelle qui dépose dans le cœur de l’homme un germe d’éternité.
« De même qu’au paradis terrestre, grâce à l’arbre de vie que Dieu y avait planté, les hommes ne pouvaient mourir de la mort du corps, de même, grâce à ce sacrement de vie, ils ne peuvent pas mourir spirituellement. » Saint François de Sales, IVD II, 20
Dans ce sacrement, le Christ nous donne en effet réellement son corps ressuscité qui est le signe de notre résurrection à venir, la promesse de la vie éternelle. Et cette vie nouvelle ne concerne pas seulement notre éternité, elle est déjà puissance de sanctification au cœur de notre misère.
« Si les gens du monde vous demandent pourquoi vous communiez si souvent, dites-leur que c’est pour apprendre à aimer Dieu, pour vous libérer de vos imperfections, vous délivrer de vos misères, pour y trouver consolation dans vos épreuves, et force dans vos faiblesses. » Saint François de Sales, IVD II, 21
Prolongement de l’Eucharistie
« Faites ceci en mémoire de moi », ne nous invite pas seulement à refaire le rite. C’est comme si Jésus nous disait : « Comme je vous donne ma chair à manger, faites de même en donnant, vous aussi, la vie ».
Ce Jésus que nous célébrons et accueillons en chaque Eucharistie nous renvoie vers les autres, vers ceux qui ont faim, ceux qui souffrent ou qui sont démunis. Quand nous allons communier, nous nous engageons à devenir des frères et sœurs universels. En somme, des autres Christ !
Dans la logique de l’amour, il ne peut en être autrement. La vie livrée de Jésus nous nourrit. Elle nous transforme afin que notre propre vie soit toujours plus identifiée à celle de Jésus et devienne une vie livrée pour l’amour du Père, ainsi que pour nos frères et sœurs.
Père Patrick-Marie FÉVOTTE