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FRANÇOIS DE SALES ET NOUS (VI)

L’esprit de liberté

François répond aux questions de Jeanne de Chantal concernant sa vie spirituelle (14 octobre 1604).

        « L’esprit de liberté, je vous dirai ce que c’est. Tout homme de bien est libre des actions de péché mortel et n’y attache nullement son affection : voilà une liberté nécessaire à salut ; je ne parle pas de celle-là. La liberté de laquelle je parle c’est la liberté des enfants bien aimés (Rm 8, 21). Et qu’est-ce ? C’est un désengagement du cœur chrétien de toutes choses, pour suivre la volonté de Dieu reconnue…

        Nous demandons à Dieu, avant toutes choses, que son nom soit sanctifié, que son royaume advienne, que sa volonté soit faite en la terre comme au Ciel. Tout cela n’est autre chose sinon l’esprit de liberté ; car, pourvu que le nom de Dieu soit sanctifié, que sa Majesté règne en nous, que sa volonté soit faite, l’esprit ne se soucie d’autre chose.

  • Le cœur qui a cette liberté n’est point attaché aux consolations, mais reçoit les afflictions avec toute la douceur que la chair peut le permettre. Je ne dis pas qu’il n’aime et qu’il ne désire les consolations, mais je dis qu’il n’engage pas son cœur en elles.
  • Il n’engage nullement son affection aux exercices spirituels ; de façon que si, par maladie ou autre accident, il en est empêché, il n’en conçoit nul regret. Je ne dis pas aussi qu’il ne les aime, mais je dis qu’il ne s’y attache pas.
  • Il ne perd guère sa joie, parce que nulle privation ne rend triste celui qui n’avait son cœur attaché nulle part. Je ne dis pas qu’il ne la perde, mais c’est pour peu.

Les effets de cette liberté sont une grande suavité d’esprit, une grande douceur et condescendance à tout ce qui n’est pas péché ou danger de péché ; c’est cette humeur doucement pliable aux actions de toute vertu et charité. (Ex. quitter une méditation pour accueillir un pauvre)

         Les occasions de cette liberté sont toutes les choses qui arrivent contre notre inclination ; car quiconque n’est pas engagé en ses inclinations ne s’impatiente pas quand elles sont diverties.

         Cette liberté a deux vices contraires : l’instabilité et la contrainte, ou la dissolution et la servitude. L’instabilité d’esprit ou dissolution est un certain excès de liberté par lequel on veut changer d’exercice, d’état de vie, sans raison ni connaissance que ce soit la volonté de Dieu … et par là, le cœur se dissipe et se perd…

         La contrainte ou servitude est un certain manquement de liberté par lequel l’esprit est accablé ou d’ennui ou de colère quand il ne peut faire ce qu’il a décidé, encore qu’il puisse faire chose meilleure…

         Il faut exercer deux règles pour ne point chopper en cet endroit :

  • C’est qu’une personne ne doit jamais laisser ses exercices et les communes règles des vertus sinon qu’il voie la volonté de Dieu de l’autre côté. Or, la volonté de Dieu se manifeste en deux façons : par la nécessité et par la charité (et une 3e rappelée à la fin : par l’obéissance).
  •  La deuxième règle est que, lorsqu’il faut user de liberté par charité, il faut que ce soit sans scandale et sans injustice … De manière que cette liberté ne préjudicie jamais aux vocations ; au contraire, elle fait que chacun se plaît en la sienne, puisque chacun doit savoir que c’est la volonté de Dieu qu’on y demeure. »

 Ici François répond à une question de Jeanne concernant la vie de prière.

Sa réponse et la « définition » qu’il donne de la liberté peuvent s’appliquer à tous les domaines de la vie. Dans son homélie à Annecy (1986) Jean-Paul II avait dit : « A tous François révélait l’accord profond de la liberté intérieure avec la volonté de Dieu. » En effet, Dieu veut des personnes libres : « Les attraits divins nous laissent en pleine liberté de les suivre ou les repousser » (TAD II, 12).

 Ce que Dieu veut, c’est notre bonheur, et Jésus nous indique le chemin pour le trouver :

 « Je fais toujours ce qui lui plaît » (à mon Père). C’est en suivant « la volonté de Dieu reconnue » que nous sommes heureux. Cette reconnaissance suppose évidemment un discernement qui nous permet d’éviter, d’un côté, le laxisme et de l’autre, le scrupule.

 La liberté s’éduque tout au long de notre vie :

nous ne sommes jamais pleinement libres. L’avertissement de Paul aux Galates vaut aussi pour nous : « Vous avez été appelés à la liberté ; seulement, que cette liberté ne se tourne pas en prétexte pour la chair ; mais par la charité mettez-vous au service les uns des autres » (5, 1-26)

       Nous sommes au service de nos sœurs et frères humains, pour que grandisse et se fortifie en eux l’esprit de liberté, et qu’ils puissent « tout faire par amour et rien par force. »

      Ce chemin de liberté nous renvoie toujours à l’Exode : « Laisse-nous quitter l’Égypte pour aller au désert servir notre Dieu. » Passer de la servitude au service.

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