En ce jour de prière pour nos défunts, nous nous appuyons sur la conviction de foi qu’après la mort et avant l’entrée dans le ciel de Dieu, il est possible d’aider celles et ceux qui nous ont quittés à accéder au salut promis. Contrairement à de nombreuses Églises protestantes, l’Église catholique, depuis les Pères de l’Église, a constamment affirmé l’existence du purgatoire comme une réalité constitutive de la foi chrétienne. L’orthodoxie, quant à elle, ne rejette pas l’idée d’une purification après la mort, mais refuse la définition précise qu’en donne le catholicisme.
Parler du purgatoire aujourd’hui n’a rien de facile. Il s’agit d’une réalité de foi catholique souvent méconnue ou délaissée dans la prédication.
Dans le livre des Martyrs d’Israël (2 Maccabées 12, 38-46), un exemple très clair de prière pour les morts est rapporté. Paul, dans la première lettre aux Corinthiens (3, 11-15), parle d’un feu purificateur, évoquant l’image bien connue de l’or que l’on passe au creuset pour le purifier et le rendre digne de Dieu. Dans l’Évangile de Matthieu (12, 31-32) et dans la lettre aux Hébreux (9, 13-14), on trouve des passages qui suggèrent que la purification existe après la vie terrestre, appuyant ainsi la prière des vivants pour les défunts et la confiance en la miséricorde de Dieu pour leur salut ultime.
Saint Augustin évoque le feu purificateur qui suit la mort pour purifier les âmes imparfaitement préparées au ciel. Il affirme que la prière pour les morts est un acte de charité pouvant aider à leur délivrance.
Nombreux sont les Pères de l’Église qui décrivent un tel feu purificateur et insistent sur la valeur des prières pour les défunts, éléments majeurs de la doctrine catholique du purgatoire, confirmée plus tard au concile de Trente.
Pourtant, de nombreuses difficultés se sont accumulées et empêchent l’adhésion spontanée à cette vérité de foi. Le purgatoire est souvent perçu comme un lieu de souffrance, comme un enfer temporaire. La prière pour les morts a parfois pris des proportions dévoyées ou mercantiles. À certaines époques, de nombreux prêtres étaient ordonnés uniquement pour dire des messes pour les défunts, parfois dans une logique plus financière que spirituelle.
Notre pensée est forcément liée à l’espace et au temps, et nous ne pouvons nous représenter l’éternité qu’au travers de ces catégories. Mais, quelle est la signification profonde du purgatoire ? Pourquoi prions-nous pour nos morts ? Quel sens donner à cette coutume, de moins en moins pratiquée, de célébrer des messes à leur intention ?
Comme le rappelle le Catéchisme de l’Église catholique : « Il ne s’agit ni d’un lieu, ni d’un temps ; on peut parler plutôt d’un état. En tout cas, le purgatoire, qui est bien une peine, n’est pas à concevoir comme une punition par laquelle Dieu se vengerait en quelque sorte de nos infidélités. La communion avec Dieu, dans laquelle nous introduit la mort, nous fait prendre conscience douloureusement de nos imperfections et du besoin de nous laisser purifier par la puissance salvatrice du Christ. » (CEC n° 1030-1031)
L’image de l’or passé au creuset, celle d’une purification, souligne notre foi et notre confiance dans l’amour du Père des cieux qui fait tout pour nous faire participer à sa vie éternelle. Il n’est jamais trop tard pour Dieu ! Son amour nous rend dignes de l’aimer pour toujours. Le purgatoire est ainsi un acte de Dieu nous éveillant à sa plénitude et son immensité.
La prière de solidarité avec nos défunts est une affirmation profonde des liens qui nous unissent, même après la mort. La séparation, si souvent douloureuse, trouve ici un point d’appui pour traverser le deuil et vivre dans l’Espérance vers un avenir en Dieu. Cette relation de prière est un véritable soutien : un appel à purifier nos vies, nos amours et nos affections, afin de nous préparer à une véritable communion, la communion des saints, entre vivants et morts.
Tu es, Seigneur Jésus, notre vie et notre résurrection. Nous te confions celles et ceux que nous avons aimés et qui ont quitté cette terre ; écoute nos prières pour qu’ils participent à ta gloire pour toujours. Mets-nous sur un chemin de conversion, afin que nous acceptions que nos forces de vie et d’amour soient passées au feu de ton amour. Amen.
Père Jean Rouet. Bordeaux


